La question de la pénibilité dans les parcours professionnels
La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a instauré diverses mesures relatives à la prise en compte de la pénibilité dans les parcours professionnels, qu'il s'agisse de sa prévention (dispositif de suivi des expositions des travailleurs, accord ou plan d'action de prévention de la pénibilité) ou de sa compensation (droit à une retraite anticipée pour pénibilité).
L'obligation d'établir une fiche d'exposition
La loi du 9 novembre 2010 introduit l'obligation pour chaque travailleur exposé à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels d'établir une fiche d'exposition.
Pour chaque travailleur exposé à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels liés à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail susceptibles de laisser des traces durables identifiables et irréversibles sur sa santé, l'employeur consigne dans une fiche, selon des modalités déterminées par décret, les conditions de pénibilité auxquelles le travailleur est exposé, la période au cours de laquelle cette exposition est survenue ainsi que les mesures de prévention mises en oeuvre par l'employeur pour faire disparaître ou réduire ces facteurs durant cette période.
La liste des facteurs de risques est définie ci-dessous (décret n° 2011-354 du 30 mars 2011 relatif à la définition des facteurs de risques professionnels) :
au titre des contraintes physiques marquées :
– les manutentions manuelles de charges définies à l'article R. 4541-2 ;
– les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;
– les vibrations mécaniques mentionnées à l'article R. 4441-1 ;
au titre de l'environnement physique agressif :
– les agents chimiques dangereux mentionnés aux articles R. 4412-3 et R. 4412-60, y compris les poussières et les fumées ;
– les activités exercées en milieu hyperbare définies à l'article R. 4461-1 ;
– les températures extrêmes ;
– le bruit mentionné à l'article R. 4431-1.
au titre de certains rythmes de travail :
– le travail de nuit dans les conditions fixées aux articles L. 3122-29 à L. 3122-31 ;
– le travail en équipes successives alternantes ;
– le travail répétitif caractérisé par la répétition d'un même geste, à une cadence contrainte, imposée ou non par le déplacement automatique d'une pièce ou par la rémunération à la pièce, avec un temps de cycle défini.
La fiche doit être individuelle. Elle est établie en cohérence avec l'évaluation des risques prévue à l'article L. 4121-3. Elle est communiquée au service de santé au travail qui la transmet au médecin du travail. Elle complète le dossier médical en santé au travail de chaque travailleur. Elle précise de manière apparente et claire le droit pour tout salarié de demander la rectification des informations contenues dans ce document.
Le modèle de cette fiche est fixé par arrêté du ministre chargé du travail après avis du Conseil d'orientation sur les conditions de travail. Une copie de cette fiche est remise au travailleur à son départ de l'établissement, en cas d'arrêt de travail excédant une durée fixée par décret ou de déclaration de maladie professionnelle. Les informations contenues dans ce document sont confidentielles et ne peuvent pas être communiquées à un autre employeur auprès duquel le travailleur sollicite un emploi. En cas de décès du travailleur, ses ayants droit peuvent obtenir cette copie.
L'obligation de conclure un accord ou d'établir un plan d'action
À partir du 1er janvier 2012, les entreprises auront l'obligation de négocier des accords ou plans d'action pour prévenir la pénibilité. L'obligation de négocier un accord d'entreprise ou de groupe portant sur la prévention de la pénibilité s'applique aux entreprises, ou établissements publics, d'au moins 50 salariés ou appartenant à un groupe d'au moins 50 salariés, et qui emploient au moins, pour 50 % de leur effectif, des salariés exposés à des facteurs de risques professionnels liés à la pénibilité.
Un projet de décret prévoit que la proportion de salariés exposés à des facteurs de risques professionnels liés à la pénibilité est fixée à 50 % de l'effectif (article D. 138- 26 du Code du travail). L'employeur détermine par ses propres moyens la proportion de salariés exposés aux facteurs de pénibilité.
Selon les projets de décret, l'accord collectif (ou le plan d'action) devra au moins porter sur l'un des thèmes suivants :
– réduction des poly-expositions aux facteurs de risques professionnels ;
– adaptation et aménagement du poste de travail. L'accord collectif (ou le plan d'action) devra en outre traiter d'au moins deux thèmes, parmi les suivants :
– amélioration des conditions de travail, notamment d'ordre organisationnel ;
– développement des compétences et des qualifications et accès à la formation ;
– aménagement des fins de carrière ;
– maintien dans l'emploi et prévention de la désinsertion professionnelle des salariés exposés aux facteurs de risques professionnels.
L'accord ou le plan devra être négocié ou élaboré à partir d'un diagnostic des situations de pénibilité dans l'entreprise. Il devra prévoir les mesures de prévention qui en découlent. La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites assortit l'obligation de négocier sur la prévention de la pénibilité d'une pénalité. En effet, les entreprises qui n'auront ni conclu d'accord ni élaboré de plan d'action d'ici le 1er janvier 2012 seront redevables d'une pénalité fixée au maximum à 1 % des rémunérations ou gains versés aux travailleurs salariés ou assimilés concernés durant toute la période non couverte par un accord ou un plan d'action.
Le droit à la retraite anticipée
La loi du 9 novembre 2010 a ouvert un droit à retraite à taux plein dès l'âge de 60 ans pour les personnes souffrant d'une incapacité permanente reconnue au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle. La présente circulaire apporte les précisions nécessaires à la mise en oeuvre de cette nouvelle législation, applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2011.
La circulaire du 18 avril 2011 apporte des précisions sur les conditions qu'il convient de remplir pour bénéficier de la retraite à raison de la pénibilité.
La retraite à raison de la pénibilité est réservée aux assurés victimes d'une maladie professionnelle ou d'un accident de travail. Cette dernière notion s'entend stricto sensu, c'est-à-dire à l'exclusion des accidents de trajet, lesquels n'ouvrent pas droit à la retraite à raison de la pénibilité.
Pour prétendre au bénéfice de la retraite à raison de la pénibilité, les assurés devront justifier d'un taux d'incapacité permanente reconnu :
– soit au titre d'une maladie professionnelle ;
– soit au titre d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle.
Il a en effet été considéré que le lien entre maladies professionnelles et pénibilité est, dans la grande majorité des cas, avéré. C'est pourquoi, s'agissant des victimes d'accident du travail, le bénéfice de la retraite à raison de la pénibilité est, en logique, réservée aux seules personnes souffrant de lésions qui auraient également pu être la résultante d'une maladie professionnelle (arrêté du 30 mars 2011 fixant la liste de référence des lésions consécutives à un accident du travail et identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle, mentionnée à l'article R. 351-24-1 du Code de la sécurité sociale).
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