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Prise en compte des dimensions facteurs humain et organisationnel dans la démarche de retour d'expérience
Comme c'est le cas pour de nombreuses entreprises exploitant des technologies à risques, le système ferroviaire français s'est construit entre autres en renforçant le dispositif technique suite aux accidents. Il est donc admis qu'il y ait toujours eu un retour d'expérience technique à la SNCF. Le REX sécurité est dédié à la sécurité des circulations ferroviaires sur le réseau ferré français. Son évolution reflète l'évolution de la prise en compte des facteurs organisationnels et humains dans ce processus d'amélioration continue.
Petite histoire du retour d'expérience
Dans les années 1980, la SNCF a dû faire face à une série d'accidents qui a durement marqué l'entreprise et conduit à la constitution de la commission Monnet, chargée de la réalisation d'un audit sur le système de sécurité de la SNCF. Le rapport d'audit remis en 1989 désigne entre autres l'organisation du retour d'expérience de l'époque comme l'un des points faibles du système de sécurité ferroviaire et en fait l'un des éléments les plus importants à développer.
Ce rapport souligne aussi que le facteur humain est insuffisamment pris en compte et que l'aspect transverse de l'analyse n'est pas assuré. Effectivement, le REX technique était jusqu'alors construit sur l'évidente nécessité d'apprendre des accidents graves pour améliorer la sécurité dans un processus d'amélioration continue. Mais l'approche de l'entreprise dans le domaine des risques ferroviaires a été longtemps plus curative que préventive, aboutissant à l'évolution de la réglementation, des procédures ou à des évolutions techniques. Ainsi, le dispositif d'arrêt automatique des trains (DAAT) et le cantonnement assisté par informatique (CAPI) sont les solutions techniques apportées suite à l'accident de Flaujac (3 août 1985) ; le contrôle automatique de vitesse (KVB) est la solution technique apportée suite aux accidents d'Argenton- sur-Creuse (31 août 1985), de la gare de l'Est (6 août 1988) et de Melun (17 octobre 1991).
Historiquement, le REX s'est donc construit sur la mesure des écarts à la règle, le facteur humain étant alors réduit à l'identification de la faute de l'opérateur et à l'appréciation du degré de gravité de cette faute. À partir des années 1990, la démarche REX de l'entreprise essaie de mieux comprendre les causes des accidents et les erreurs.
Historiquement, le REX s'est construit sur la mesure des écarts à la règle, le facteur humain étant réduit à l'identification de la faute de l'opérateur et à l'appréciation du degré de gravité de cette faute
Dans un texte publié en 19951, Sablier et Vittumi témoignent du travail et des efforts fournis par l'entreprise en matière de REX suite à cette série d'accidents qui a donné lieu au rapport de la commission Monnet. En 1991, le dispositif REX métier est mis en place par les deux directions importantes de l'entreprise à l'époque : la direction du Transport et la direction de la Traction. Le concept de REX est diffusé dans l'entreprise avec le slogan des « :trois mieux » : « :mieux connaître, mieux comprendre, mieux tirer profit ». À l'image du REX technique, le dispositif aboutit dans un premier temps à des indicateurs du type fréquence de défaillance. La mise en place de ce dispositif REX ne se traduit pas immédiatement par une évolution des analyses qualitatives des événements. L'analyse des accidents recensés et capitalisés dans ces bases de données progresse lentement vers la compréhension du rôle des acteurs dans la sécurité. Progressivement, l'explication évolue de
l'identification de la faute ou de l'erreur de l'opérateur vers la compréhension de l'impact des facteurs humains et organisationnels sur la gestion de la situation par l'opérateur.
La mise en oeuvre du dispositif REX est accompagnée de la mise en place du Centre d'études sécurité qui assure entre autres le rôle d'assembleur des analyses REX menées par les différentes directions de la SNCF.
La mise en oeuvre de ces deux dispositifs va permettre à l'entreprise de se préparer à l'étape suivante : l'intégration des dimensions FOH dans les analyses qualitatives des accidents.
L'intégration de la dimension FOH dans l'analyse des accidents : une étape à part entière
La structure et l'organisation du REX évoluent avec l'organisation de l'entreprise, et en 2006 les cinq principales directions d'activité Fret, Matériel, Traction, Voyageurs et Infrastructure possèdent leur propre démarche REX organisée ainsi que leurs propres bases de données. Ces bases de données comportent :
– un volet statistique qui confirme ou complète les modes de défaillance identifiés lors de l'analyse a priori des risques grâce au retour systématique d'informations sur le comportement du système ;
– un volet qualitatif comprenant la recherche de connaissances sur le fonctionnement du système et qui intègre une dimension FOH dans l'analyse.
Le volet facteur humain de l'analyse, couramment appelé REX FH, est alors déployé et approfondi grâce à un guide de recueil d'informations conçu en interne dans le cadre d'un projet porté par la direction de la Sécurité de la SNCF. Destiné aux acteurs en charge de l'enquête et de l'analyse, ce document est intégré dans la documentation sécurité de l'entreprise en 2005 et est déployé progressivement dans les différentes structures de l'organisation. L'accompagnement du déploiement de la démarche est poursuivi plusieurs années. La mise en oeuvre de cette démarche d'analyse transverse des événements est accompagnée de nombreuses formations et informations destinées aux managers de proximité et aux cadres qui interviennent lors du recueil d'informations et lors des analyses. Le recueil des informations dites « :transverses à l'entreprise » permet que le recueil des informations relatives à l'accident soit complet, indépendamment de la structure de l'organisation. Cela assure donc aux acteurs de disposer des informations nécessaires à l'analyse. La plus-value est rapidement perçue par les équipes chargées de veiller à la qualité des analyses d'accidents et des actions mises en oeuvre. L'adhésion à la démarche est rapide en ce qui concerne certains acteurs, et le recours aux compétences présentes dans l'entreprise est un moyen de faire face à l'augmentation de la charge de travail induite par cette évolution. Les disciplines faisant partie du champ des FOH telles que l'ergonomie, sont progressivement intégrées aux analyses d'accidents.
Le dispositif REX aujourd'hui à la SNCF : d'autres étapes en perspective
Malgré les changements de poste des acteurs formés à la démarche, et bien que l'entreprise doive actuellement s'adapter aux évolutions du système ferroviaire français, l'intégration des FOH a durablement marqué la démarche d'analyse des accidents ferroviaires.
Aujourd'hui, le système de management de la sécurité de la SNCF et son fonctionnement sont décrits dans un document lui aussi intégré dans la documentation sécurité de l'entreprise. Ce document montre la volonté de l'entreprise d'intégrer les facteurs organisationnels et humains dans sa politique de management de la sécurité, et définit le système ferroviaire comme un ensemble dont l'acteur humain fait pleinement partie – les personnels comme les voyageurs. Intégré au management de la sécurité ferroviaire, le REX est affiché comme participant à la maîtrise de la sécurité. Cette directive précise que le REX consiste à recueillir les informations relatives aux différentes composantes du système ferroviaire (techniques, humaines et réglementaires) ayant eu des conséquences sur la sécurité, à analyser ces informations et à restituer aux échelons intéressés les résultats de ces analyses.
Par conséquent, à la SNCF de 2010, le REX est affiché et porté au plus haut niveau de l'entreprise comme un outil participant à la maîtrise de la sécurité ferroviaire.
Le dispositif associé est décrit dans un document propre au REX, qui reprend ces informations en les déclinant selon l'organisation de l'entreprise.
L'apparition de nouveaux acteurs conduit la SNCF à adapter son organisation. Ces modifications nécessitent de travailler à nouveau l'aspect transverse du REX, en tenant compte du rôle de l'autorité de sécurité et de la présence des nouveaux opérateurs ferroviaires.
C'est par là-même l'occasion d'enrichir le nouveau dispositif par l'ajout de deux champs intitulés « :Facteurs positifs identifiés dans l'événement », marquant ainsi la volonté de l'entreprise de s'engager dans une nouvelle phase d'évolution du dispositif.
À la SNCF, le REX est affi ché et porté au plus haut niveau de l'entreprise comme un outil participant à la maîtrise de la sécurité ferroviaire
En effet, bien que le REX positif ne soit pas mentionné dans les règlements généraux, il apparaît néanmoins à diverses reprises dans certains documents d'entreprise. Un document d'archive daté de 1991 accompagne le lancement de la démarche REX et de la base REX Traction issues des réflexions menées suite à la série d'accidents des années 1980 et au rapport Monnet. Ce document mentionne très clairement le REX positif comme un axe de développement possible du REX, dont la mise en oeuvre est reportée pour une date ultérieure. En 2010, la mise en oeuvre du REX positif est sérieusement envisagée comme un axe de développement du dispositif REX.
Cette volonté de la direction est marquée par une adhésion des acteurs de l'entreprise à différents niveaux, puisque certaines bases de données proposent déjà des champs de recueil des facteurs positifs identifiés dans l'événement, et que des initiatives locales nommées REX positif sont progressivement identifiées.
Ainsi, le renforcement progressif du dispositif REX de l'entreprise sur les 20 dernières années peut être considéré comme un atout de la SNCF pour faire face, en sécurité, aux évolutions du système ferroviaire français.
1. Sablier P. et Vittumi H. Le retour d’expérience appliqué à la sécurité : la mise en oeuvre de la direction du Transport à la SNCF. Revue générale des chemins de fer, 1995, 6 : 5-10.
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