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L'étendue de l'obligation de sécurité et les conditions de mise en cause de la responsabilité de l'entreprise de travail temporaire et de l'entreprise utilisatrice précisées en cassation
L'arrêt rendu le 30 novembre 2010 par la chambre sociale de la Cour de cassation (décision n° 08-70390) casse et annule une décision de la cour d'appel de Poitiers concernant la demande de dommages et intérêts formulée par un travailleur intérimaire.
Dans cette affaire, le travailleur intérimaire concerné est engagé en mars 2004 en qualité de soudeur inox et, à ce titre, exposé aux poussières de soudage (travaux dangereux).
En accord avec le médecin du travail, l'entreprise utilisatrice décide alors de mettre en place un suivi médical d'exposition mensuel (article R. 4624-19 du code du travail) et de fournir des équipements de protection individuelle (EPI : article L. 1251-23 du code du travail) adaptés au risque (masques à adduction d'air).
Ces derniers ne sont pas remis au salarié dès le début de sa mission. En revanche, le suivi médical démarre prestement et, le 18 juin 2004, le travailleur intérimaire est déclaré inapte à titre préventif par le médecin du travail en raison d'une contamination par le chrome, sans lésion ou maladie déclarée.
Le salarié saisit alors le conseil de prud'hommes en vue d'obtenir la condamnation solidaire de l'entreprise de travail temporaire et de l'entreprise utilisatrice. Il souhaite recevoir des dommages et intérêts pour manquement à leur obligation de sécurité (EPI non fournis dès la prise de poste).
La cour d'appel de Poitiers rejette les demandes formulées par le travailleur intérimaire. Elle estime en effet qu'aucune des deux entreprises n'a manqué à ses obligations applicables en matière de prévention. Sa décision s'appuie notamment sur le fait qu'il n'existe pas d'atteinte avérée à la santé du travailleur temporaire et sur le fait qu'un suivi médical d'exposition avait bien été mis en place par l'entreprise utilisatrice.
La chambre sociale de la Cour de cassation s'oppose à la solution retenue. Elle casse et annule ainsi l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers.
La chambre sociale de la Cour de cassation rappelle ici que le manquement à une obligation de prévention suffit à engager la responsabilité de l'employeur que le salarié ait ou non subi une atteinte pour sa santé.
Cet apport vient confirmer la solution retenue dans une autre affaire rendue en matière de tabagisme au travail un peu plus d'un mois auparavant (décision n° 09-65103 du 6 octobre 2010).
Cet arrêt souligne en outre que les entreprises utilisatrices et de travail temporaire peuvent être poursuivies pour des manquements à leurs obligations en matière de prévention des risques professionnels. Elle relève à ce titre que la cour d'appel aurait dû rechercher si des manquements pouvaient être reprochés à l'une ou l'autre des sociétés poursuivies.
Il convient cependant de noter que la Cour de cassation ne se prononce pas sur l'engagement effectif de la responsabilité des deux entreprises concernées. Elle renvoie les parties devant la cour d'appel de Bordeaux.
Cette décision présente deux apports essentiels. En premier lieu, il apparaît clairement que la responsabilité civile d'un employeur peut être engagée en raison d'un manquement à ses obligations en matière de prévention, et cela même en l'absence d'atteinte à la santé d'un salarié. Il s'agit d'une petite révolution dans le sens où le salarié attaquant son employeur n'a désormais plus besoin de prouver l'existence d'un dommage sur sa santé pour faire reconnaître l'existence d'une faute de ce dernier. À ce titre, le non-respect des exigences législatives et réglementaires en matière de santé et sécurité au travail pourrait avoir des conséquences plus lourdes que par le passé sur le plan de la responsabilité civile des employeurs.
Le second apport essentiel de l'arrêt concerne le fait que chaque entreprise (de travail temporaire ou utilisatrice) peut voir sa responsabilité engagée en cas de manquement à une ou plusieurs de ses obligations applicables en matière de prévention des risques professionnels.
En conclusion, il apparaît que cette décision de la Cour de cassation renforce la protection des travailleurs intérimaires en éclairant les juges sur les conditions d'engagement de la responsabilité des entreprises de travail temporaire et utilisatrices. Le respect des obligations légales applicables en cas de recours à des intérimaires est donc nécessaire car dorénavant un salarié peut faire reconnaître l'existence d'une faute de son employeur ou de l'entreprise utilisatrice, même en l'absence d'atteinte à sa santé.
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